De Thucydide à Machiavel, de la perception aveugle à la peur qui verrouille nos choix

Table des matières

1       Introduction.

1.1        Perception et pouvoir : de Thucydide à Machiavel, à la grille EPS/EPV.

1.2        Thucydide : la perception qui mène à la catastrophe.

1.3        Machiavel : la perception comme terrain du pouvoir

1.4        Bustamante : la perception comme pluralité.

1.5        La grille EPS/EPV : relier peur, perception et pouvoir

2       Conclusion : unir les trois regards.

V01-08/25

1          Introduction

1.1           Perception et pouvoir : de Thucydide à Machiavel, à la grille EPS/EPV

Depuis des millénaires, les penseurs se heurtent au même mystère : pourquoi les humains s’égarent-ils si souvent dans leurs choix, leurs guerres, leurs relations ?

Un même constat revient, à chaque époque : ce ne sont pas les faits qui guident nos décisions, mais la perception que nous en avons.

Et cette perception, trop souvent, est déformée par la peur, l’orgueil, l’ego, ou le besoin de contrôle.

De Thucydide à Machiavel, à nos grilles contemporaines, un fil rouge se dessine. La question n’est pas seulement : « Que voyons-nous ? » mais « Qu’est-ce qui déforme ce que nous voyons ? »

1.2           Thucydide : la perception qui mène à la catastrophe

Il y a 2400 ans, Thucydide écrivait l’histoire de la Guerre du Péloponnèse (voir article wetwo.fr/thucydide). Pour lui, les grandes tragédies ne naissent pas seulement des armes, mais d’un enchaînement invisible : la peur et l’orgueil qui faussent la perception.

Athènes et Sparte ne lisaient pas la réalité : elles projetaient leurs angoisses, se persuadaient d’être menacées, et se laissaient enchaîner par leur propre récit. C’est ainsi que les peuples, aveuglés par leurs passions, s’enfoncent dans la guerre.

Son avertissement reste d’une brûlante actualité : quand la perception n’est pas corrigée par les faits, l’illusion devient collective, et la justice disparaît.

1.3           Machiavel : la perception comme terrain du pouvoir

Mille ans plus tard, Machiavel reprend le fil. Mais au lieu de parler des peuples, il se concentre sur les princes, les individus qui exercent le pouvoir.

Sa lucidité est tranchante : ce n’est pas la vérité qui compte, mais la perception des autres, ce que les autres croient.

Derrière une critique ou une accusation, il ne voyait pas une recherche de justice, ni une recherche de clarté, mais une stratégie : détourner l’attention, imposer un cadre. Il y a une volonté de contrôler l’image et de tester la solidité de l’autre, par jalousie déguisée, peur ou besoin de dominer l’autre.

 » Celui qui se justifie perd déjà la bataille. « : celui qui se justifie perd déjà, car il adopte le rôle d’accusé.

Dans cette phrase, il résume ce que vivent encore aujourd’hui tant d’âmes sensibles : la sincérité se retourne contre elles quand elles l’opposent à un calcul.

« Il faut donc être renard pour connaître les pièges et lion pour effrayer les loups ». Cette phrase est une clé : elle rappelle que seule l’observation du contexte ou l’analyse, permet de déjouer les biais et perceptions trompeuses.

1.4           Bustamante : la perception comme pluralité

Plus près de nous, Bustamante (voir article wetwo.fr/perception) propose une pédagogie simple : chacun a sa perception, et il est essentiel d’apprendre à considérer aussi celle de l’autre.

Cette approche est précieuse pour comprendre la diversité des points de vue. Mais elle porte un risque : oublier les faits.

Car relativiser à l’infini, c’est parfois perdre la réalité en chemin. La pluralité des perceptions ne doit pas effacer le socle commun de ce qui est vrai. Sans cela, on reste dans une mosaïque de subjectivités qui peuvent justifier tout… et son contraire.

1.5           La grille EPS/EPV : relier peur, perception et pouvoir

C’est ici qu’intervient une lecture nouvelle. La grille EPS/EPV (voir article wetwo.fr/invisible) montre que la perception n’est jamais neutre : elle est façonnée par les blessures et les peurs.

  • Chez l’EPV, la peur verrouille. Pour ne pas sentir la douleur initiale, l’inconscient construit une stratégie de contrôle. De l’extérieur, cela ressemble à un calcul volontaire. Mais en vérité, c’est la blessure qui dirige. Pour la grande majorité des EPV, c’est l’inconscient qui mène : le contrôle devient un jeu de survie. Il peut sembler stratégique, mais il ne l’est pas vraiment. C’est simplement le maintien dans la peur de ne pas maîtriser les émotions et la douleur du passé. Ainsi, tout devient contrôle.
  • Chez l’EPS, la sincérité est naturelle, mais peut se transformer en vulnérabilité : vouloir clarifier, expliquer, se justifier. C’est ainsi qu’il tombe dans le piège d’un rapport de force qu’il n’a pas choisi.

Ce que Thucydide appelait peur et orgueil, ce que Machiavel appelait calcul du pouvoir, devient dans cette grille la stratégie inconsciente née d’une blessure émotionnelle (voir article wetwo.fr/peur et wetwo.fr/milgram).

2          Conclusion : unir les trois regards

  • Thucydide nous avertit : la perception aveugle, guidée par la peur, conduit à la catastrophe collective.
  • Machiavel nous enseigne : la perception est un champ de bataille où il faut refuser le rôle imposé, et celui qui se justifie perd déjà.
  • Bustamante rappelle : il faut considérer l’autre point de vue, il existe autant de perceptions que d’individus, et apprendre à les voir enrichit la compréhension.
  • La grille EPS/EPV révèle enfin : derrière chaque perception déformée se cache une peur verrouillée, et que la sortie n’est pas seulement stratégique, mais émotionnelle.

En résumé, derrière toutes les guerres, les humiliations, les abus ou les manipulations, on retrouve la même racine : la peur. Peur du rejet, de l’humiliation, de ne pas être aimé. Cette peur renvoie toujours aux blessures anciennes qui, non reconnues, gouvernent l’homme à son insu.

De Thucydide à Machiavel, chacun à leur manière, ces observateurs lucides avaient déjà perçu ce défaut majeur de l’humanité. Aujourd’hui, en reliant ces intuitions aux blessures psychiques, nous savons que ce n’est pas une fatalité : la peur peut être traversée, et nos histoires réécrites.

C’est là où le monde peut changer.

Machiavel décrivait un jeu éternel de pouvoir. Thucydide voyait des catastrophes inévitables. Mais si la perception est façonnée par les blessures, alors guérir ces blessures, apprendre à écouter ses émotions et distinguer les faits des projections… c’est rouvrir la possibilité d’un autre avenir.


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