
Table des matières
1 Manipulation de masse : quand la peur et la conformité verrouillent les foules.
2 La mécanique du réflexe collectif
3 Le modèle EPV/EPS : la fabrique du verrouillage collectif
4 Sortir du cercle : réhabiliter la sensibilité.
V02-05/25
1 Manipulation de masse : quand la peur et la conformité verrouillent les foules
Après avoir exploré la peur à l’échelle individuelle, voyons comment elle est exploitée et amplifiée à l’échelle de la société entière.
La manipulation de masse ne fonctionne pas sur le désir authentique, mais sur l’activation de nos peurs les plus archaïques, de notre besoin d’appartenance, de contrôle et de sécurité. Voici comment, à travers la consommation, la société moderne enferme les individus dans le mode EPV.
2 La mécanique du réflexe collectif
Depuis un siècle, la manipulation des foules n’est plus un art mais une science.
Publicité, propagande, réseaux sociaux, médias : tous jouent sur les mêmes leviers.
Leurs cibles ?
Non pas notre liberté, ni notre désir personnel, mais nos réflexes de survie :
- Peur du manque
- Peur d’être exclu du groupe
- Besoin de se rassurer par la possession
- Besoin de conformité, de contrôle
En activant ces ressorts, la manipulation détourne l’humain de lui-même, l’anesthésie, le pousse à agir sans discernement, dans un automatisme qui confond survie et vie.
2.1 Le mirage du désir
On croit que la société de consommation exploite nos désirs. Mais ce n’est pas notre désir profond qui est mobilisé : c’est notre peur du manque, notre besoin d’être reconnu, notre réflexe de suivre le groupe.
La manipulation ne « fait pas naître » le désir : elle le contourne, elle l’anesthésie pour activer des automatismes hérités de la survie collective ; c’est une contagion comportementale, bien plus qu’un partage d’émotion.
- Exemple concret : le consumérisme de masse
On a tous vu ces scènes de soldes ou de Black Friday :
Des foules se précipitent, se bousculent, parfois se battent pour acheter des vêtements ou des objets « rares » et soldés.
Qu’est-ce qui se joue vraiment ?
- Peur du manque : “Si je n’y vais pas, il n’en restera plus.”
- Conformité sociale : “Tout le monde y va, donc je dois suivre le mouvement pour ne pas être exclu.”
- Contrôle et compétition : “Je dois posséder ce que d’autres n’auront pas.”
- Recherche de pouvoir symbolique / possession « Posséder cet objet me donne une illusion de supériorité ou de sécurité, c’est prouver sa valeur ».
Dans ce spectacle, il ne reste presque rien du désir vivant, rien, dans ce comportement, n’évoque un désir libre, un choix personnel : tout est absorbé par l’angoisse, la pression sociale, la fuite du vide intérieur, et le réflexe d’appartenance.
Ce n’est pas le désir qui court dans les rayons, c’est la peur du manque, la recherche d’un refuge dans l’objet, la peur d’être moins que les autres.
2.2 La contagion :
Ce qui se propage dans la foule n’est plus une émotion vivante, mais un réflexe collectif : une contagion mimétique où chacun réagit à l’urgence ou à la peur de manquer, sans même se demander ce qu’il désire vraiment.
Dans ces phénomènes de masse, ce n’est pas l’émotion qui circule, mais un automatisme : un signal d’alerte collectif, une urgence à agir « comme tout le monde », sans passage par la sensibilité ou la réflexion.
Le consumérisme de masse, c’est le mode EPV mis en scène à l’échelle d’une société.
La logique du consumérisme se prolonge aujourd’hui dans l’achat compulsif de smartphones, d’abonnements ou de produits « influencés » sur Instagram ou TikTok.
Aujourd’hui, le phénomène s’étend des rayons de supermarché aux plateformes numériques : le like, le swipe, la story à ne pas manquer, sont autant de signaux qui nourrissent ce réflexe collectif. Même en ligne, l’humain verrouillé court après l’approbation du groupe, souvent sans s’en rendre compte.
La marque, le logo, l’objet à la mode deviennent des uniformes invisibles : ils rassurent en offrant une appartenance, mais éloignent de la singularité.
Pendant longtemps, ce besoin d’appartenance m’a semblé incompréhensible.
Voir chacun courir après la même marque, le même style, comme si la singularité était devenue un risque à éviter.
Ce nivellement par l’identique, ce modelage du groupe, m’a longtemps laissé perplexe :
Pourquoi préférer la ressemblance à la rencontre ? Pourquoi effacer ce qui rend unique ?
Il m’a fallu du temps pour comprendre : la peur de l’exclusion est si forte, si enfouie, que l’on préfère s’oublier plutôt que de risquer d’être vu – ou pire, de ne pas l’être.
L’amour conditionnel commence là : « Tu seras aimé si tu ressembles aux autres, si tu portes le bon masque, si tu respectes le code. »
Ce qui est activé | Ce qui est absent |
Peur du manque | Désir personnel |
Conformité | Liberté intérieure |
Compétition | Joie simple |
Contrôle/possession | Créativité vraie |
3 Le modèle EPV/EPS : la fabrique du verrouillage collectif
- Les dispositifs de marketing et de propagande sont conçus pour activer ces automatismes et transformer des individus vivants en foules dociles, répétitives et manipulables.
- Le lien avec la manipulation de masse et le modèle EPV/EPS
Ce qui se joue ici est exactement la mécanique de la manipulation de masse décrite par Bernays (Propaganda), Cialdini (Influence et Persuasion) et reprise dans le modèle EPV/EPS . Dans ces moments de consommation de masse, l’humain en mode EPV est roi :
- Plus l’humain est verrouillé émotionnellement (EPV), plus il réagit à l’extérieur : peur, ordre, norme, rareté, urgence, pression.
- Le désir véritable est court-circuité : il n’y a plus de choix libre, conscient, seulement l’angoisse de manquer, la peur d’être moins, la volonté de ne pas être exclu.
- Le marketing, la propagande et les dispositifs de rareté sont autant de leviers pour activer ces réflexes et ces automatismes et transformer des individus vivants en foules dociles, répétitives et manipulables.
4 Sortir du cercle : réhabiliter la sensibilité
Ce mécanisme alimente non seulement la docilité des consommateurs, mais aussi celle des électeurs, des employés, etc.
Face à cette fabrique du consentement, la résistance commence par une reconnexion à soi :
- Retrouver l’accès à ses émotions, à son désir authentique, à sa capacité de discernement personnel.
- Repérer en soi les petits signaux d’alerte : envie irrépressible d’acheter, sentiment de manque après l’achat, excitation suivie de vide.
Un individu qui se reconnecte à lui-même peut reconnaître les signaux de manipulation, différencier ses vrais besoins de ceux qui lui sont imposés, et sortir du cercle de la peur et de la conformité.
Ce n’est qu’en réhabilitant la sensibilité, l’intériorité, le désir vivant, que nous pouvons sortir du cercle de la manipulation – et redevenir des humains, non des automates sociaux.
En refusant l’uniformisation, en osant rester singulier, chacun participe à faire reculer la fabrique du consentement. La véritable liberté commence par la reconnexion à son désir profond.
« La publicité ne vend pas des produits, elle vend la peur de ne pas être comme les autres. » – Vénoa
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